Cheikh Ahmad Qamareddine
Homme politique/religieux, littéraires et linguistique
Ahmad Qamardine (1889-1974) est né à Bouni, près de Mbéni, d’une mère mbénienne et d’un père originaire du village de Bangwa-Kouni, Ali Msoma,un éminent religieux ayant fait ses études islamiques à Zanzibar.
C’est à Mbéni, où il a grandi, que Qamardine (littéralement: Lune de religion) a maîtrisé la lecture du Saint Coran dans l’école coranique dirigée par sa mère Dawa Mbafoumou. Son père lui a appris les rudiments de l’enseignement islamique à travers de petits opuscules imprimés dans le Sous-continent indien et en Afrique de l’est. Il lui a appris, entre autres livres, les quarante hadiths de l’imam Nawawi (arba’ina an nawawi), un livre de hadith, tha ahmad, un livre de tawhid (Sciences de l’unicité de Dieu) et enfin un livre de grammaire arabe ou nahw.
Après quoi son père l’a envoyé à Bangwa-Kouni pour poursuivre ses études post-coraniques auprès d’un religieux local prénommé Cheikh Kassim. Ayant acquis de solides connaissances après plusieurs années d’étude, Ahmad Qamardine a quitté Bangwa pour Moroni où il s’est inscrit à l’école publique officielle dans les années 1910. Après quelques années de fréquentation de cette institution coloniale, Qamardine est nommé secrétaire greffier auprès du Cadi de la ville de Ntsoudjini, Abdoulatuf Msafoumou, fils du dernier sultan d’Itsandra. Certes son bureau de fonction était à Ntsoudjini, mais ce fut à Itsandra-Mdjini, où il s’était marié, qu’il dormait. C’est là où il a rencontré le Grand maître et talentueux religieux Al-Habib Umar ben Soumeit (1886-1974) auprès de qui il a étudié l’alfiyyat ibn malik (Le traité de grammaire arabe d’Ibn Mâlik) et le minhadj at-talibin de Nawawi (mort en 1277). Ahmad Qamardine a acquis plusieurs idjaza (licence d’enseigner) auprès de cet illustre religieux, comme il en a acquis d’autres auprès d’autres fundi comme Fundi Maoulana et Mouigni Toyibou.
A Ntsoudjini, Qamardine s’occupait aussi de l’enseignement religieux jusqu’à la fin des années 1910, début 1920, période pendant laquelle un affaire de corruption faisait écho dans son service: ses supérieurs hiérachiques auraient détourné de l’argent. Mais en tant que secrétaire greffier, Qamardine fut indexé et accusé. Il fut donc transféré à Mayotte, siège de l’administration coloniale, où une décision de justice devrait être prononcée à son encontre.
C’est là, à Mayotte, qu’il a rencontré le gouverneur de Madagascar (Léon Cayla?) qui, stupéfait par cet homme ayant bénéficié d’une formation pluridisciplinaire, s’est résolu de partir travailler avec lui à Mdagascar.
Pendant son séjour dans la Grande Ile, Ahmad Qamardine ne renonçait guère au goût du savoir et d’apprendre. Il a approfondi son expression de la langue française, appris à lire et à écrire l’Anglais, le Hindi et le Malgache. Il a effectué deux voyages d’étude à l’île Maurice pour rencontrer deux théologiens saoudiens, l’un de Médine, Abdallah Ben Abibacar Sadiqiyyou Al Madaniyyou, et l’autre de la ville sainte de La Mecque, Abdallah Al Rachid Al Nawwab. C’est de ce dernier qu’il a appris la rhétorique, la métrique, la poésie arabe, et surtout le commentaire du Coran (tafsir) dont il est devenu plus tard le premier initiateur à la Grande Comore dès les années 1920. En effet, pendant le mois de ramadan, il rentrait en vacances à Mbéni où il traduisait et commentait le Coran à la grande mosquée de vendredi, devant une assistance, venue de parttout, pour assister à son cours.
Ahmad Qamardine a laissé des oeuvres variées, dominées essentiellement par la culture littéraire, linguistique et religieuse. Dans le domaine religieux et théologique, il a écrit un traité normatif intitulé La norme d’Ahmad. Le 27 du mois de radjab 1345 de l’hégire (1927), il a présenté ce livre dans une cérémonie officielle tenue à Moroni, devant des hautes personnalités politiques et religieuses de Ngazidja. Au terme de cette cérémonie solennelle, Cheikh Amir ben Salim ben Boubah (1880-1965) a prononcé un discours en arabe dans lequel il a loué les efforts, le courage et le patriotisme de Qamardine.
Ahmad Qamardine a aussi écrit un livre intitulé qur’atoun ahmadiyya (La souscription d’Ahmad) et un douwa (invocation) sur les attributs de Dieu, intitulé asmaou allah al’housna.
Dans le domaine linguistique, Ahmad Qamardine avait, sur la base des lettres arabes, proposé un alphabet comorien et une graphie pouvant aboutir à une grammaire comorienne. Malheureusement, ses propositions s’étaient heurtées à l’opposition de la grande majorité des maîtres coraniques et des grands lettrés musulmans, qui, n’ayant pas compris le sens de la démarche proposée par Qamardine, avaient accusé ce dernier de vouloir purement et simplement “changer le Coran”. Ce projet échoue!
A partir de 1960-1961, Ahmad Qamardine a commencé à rédiger un journal appelé mwando (Début), mais faute de moyens, ce journal n’a pas survécu longtemps.
Outre ses atouts religieux, littéraires et linguistique, Ahmad Qamardine comptait parmi les politiciens de l’Archipel des Comores. Il fut un militant actif pour l’indépendance, et plusieurs fois conseiller du Président Said Mohamed Cheikh, du Prince Said Ibrahim et, enfin, du Président Ahmed Abdallah Abdérémane.
Ali Mohamed Toibibou
source: mbeniconnect